mardi 7 décembre 2010

WikiLeaks, le cauchemar des politologues

Je suis vraiment impressionné par le nombre de professionnels du monde journalistique et académique qui se prononcent publiquement contre les gestes de WikiLeaks. Aujourd'hui, c'est au tour de Daniel Drezner, professeur réputé de relations internationales, qui nous explique que WikiLeaks est mauvais pour sa profession : désormais, le gouvernement sera encore plus secret, et les politologues auront moins accès au matériau empirique nécessaire à la bonne recherche.

En introduction, Drezner nous fait part de son pire cauchemar, soit présenter des résultats de recherche sur le gouvernement pour ensuite être discrédité par un collègue avec preuves. A la fin, sa carrière est "en ruines", rien de moins! Et désormais, à cause de WikiLeaks, ces preuves au potentiel si destructrices pour le monde académique seront cachées de tous et seulement rendues disponibles quelques décennies plus tard, où sans crier gare, elles jetteront des masses de politologues à la rue.

Bien entendu, il n'en est rien. D'abord, j'ai vu des tas de politologues se tromper au sujet des motivations des gouvernements ou de leurs prédictions (la guerre en Irak!), et aucun d'entre eux n'a ruiné sa carrière pour autant. Ensuite, je ne vois pas pourquoi les journalistes et chercheurs attendraient poliment que le gouvernement leur révèle leurs véritables objectifs. N'est-ce pas leur but de révéler ce qui se passe, même contre la volonté des pouvoirs?

Le véritable cauchemar des politologues, celui qui ruine les carrières pour vrai, ce n'est pas de se tromper, mais bien de passer pour un révolutionnaire radical. A ce moment, vous perdez toute crédibilité, et vous pouvez oublier les subventions et les revues prestigieuses. A voir tous ces Gens Sérieux dénoncer WikiLeaks, j'ai acquis la ferme conviction que cette bibliothèque virtuelle de données précieuses ne sera jamais utilisée dans les milieux académiques respectables. Personne ne voudra associer son nom à celui de Julian Assange et ainsi passer pour un anarchiste frustré.

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